Après de nombreux hiatus, les fruits confits du hasard et autres chamboulements existentiels nous réduisant à raréfier notre présence sur les ondes binaires et encore plus sur ce blogue, nous sommes, les aminches, si j'ose le dire, de retour...pour de bon.
Nous sommes de retour cette semaine avec une émission dont nous tiraille depuis longtemps, un hommage au comédien Rondo Hatton et à son personnage du Creeper.
Appelé à passer à l'histoire, la cruauté du hasard n'aura permis que partiellement la consécration de l'acteur et chez une frange "spécialisée" de la cinéphilie seulement. Pourtant, Hatton et son Creeper mérite une reconnaissance qui transcence les genres cinématographiques. Il est une créature de cinéma à part entière.
Pour les néophytes: Hatton était atteint d'un cas sévère d'acromégalie, un problème hormonal qui déforme les mains, les pieds et particulièrement le visage. La vie de Rondo fut brève. Il ne passera pas la cinquantaine. Il connut la guerre et un amer succès en devenant le malabar de service dans une quantité de films de série B dans lesquels il n'était que rarement crédité. Homme-singe, malfrat, fier-à-bras; la totale.
Jusqu'à ce qu'il donne naissance au tueur-étrangleur nommé The Creeper, le temps d'une aventure de Sherlock Holmes ("The Pearl of Death", 1944, avec l'éternel Basil Rathbone dans le rôle du détective). Il le jouera canoniquement dans deux autres films (trois pour les non-puristes). A star was born...mais l'étoile brûlera le temps d'une comète. Ces deux films, Rondo n'aura jamais le temps de voir en salle avant sa mort, nais sa présence silencieuse, sa démarche lourde et sa voix caverneuse n'allait pas sombrer dans l'oubli.
Impossible de ne pas voir chez The Creeper le vestige des grands monstres de l'expressionisme allemand. Il en est même en quelque sorte la synthèse. Si la Universal grappillait alors allègrement des méthodes et des thèmes chez les maîtres germaniques, c'est avec les films qu'elle produisait le mettant en vedette que le tout devenait d'emblée flagrant. À la fois Césare, le tueur de "M" et le Gwynplaine de "L'homme qui rit", le Creeper a beau être un des premiers tueurs en série de l'histoire du cinéma (il est même l'exemple type du proto-slasher, n'ayant besoin que de ses mains pour tuer), il est aussi l'esclave de sa propre nature. Il ne peut s'empêcher d'étrangler les femmes et de briser la colonne des hommes. Comme le somnambule du "Cabinet du docteur Caligari", le Reinfield de "Nosferatu" et la Maria de "Metropolis", il est cet individu robotisé, réduit à la servitude par un despote manipulateur, une mise en garde contre la démesure et la mégalomanie des dirigeants. Un golem de chair, cruellement sculpté par la vie.
Volontairement ou non de la part des réalisateurs, à mesure que le Creeper évoluait, plus son histoire se confondait avec celle de Rondo; le thème de l'exploitation du monstre par un maître devenait indissociable de celle que connaissait Hatton au sein des studios. Il aura "choisi" de se laisser exploiter, ne voyant pas d'autres options. En ce sens, les deux derniers films réalisés en 46 juste avant sa mort, "House of horrors" et "The brute man", exercent un pouvoir de fascination supplémentaire. Certes, ce sont des films beaucoup plus subtils qu'ils n'y parait de prime abord mais on y voit aussi le début et la fin d'un envol. Des lors, il est impossible de ne pas y voir une manière de prophétie. Celle d'un homme dégouté de lui même mais dont la cage de chair sera aussi le seul refuge.
Depuis, le visage de Rondo est célébré dans une pléthore de médium. La culture populaire a su lui rendre l'hommage qu'il méritait. Il fut le méchant Lotharo dans "The Rocketeer",
Il est le "véritable" visage de Judge Dredd...
...et une statue porte désormais son visage, le Rondo Hatton Classic Horror Awards, un prix remis par un vote de public aux gens oeuvrant dans le milieu de l'horreur.
Cette semaine, Rondo Hatton, une analyse de ses films, une évocation de sa vie, une célébration de l'homme.
Appelé à passer à l'histoire, la cruauté du hasard n'aura permis que partiellement la consécration de l'acteur et chez une frange "spécialisée" de la cinéphilie seulement. Pourtant, Hatton et son Creeper mérite une reconnaissance qui transcence les genres cinématographiques. Il est une créature de cinéma à part entière.
Pour les néophytes: Hatton était atteint d'un cas sévère d'acromégalie, un problème hormonal qui déforme les mains, les pieds et particulièrement le visage. La vie de Rondo fut brève. Il ne passera pas la cinquantaine. Il connut la guerre et un amer succès en devenant le malabar de service dans une quantité de films de série B dans lesquels il n'était que rarement crédité. Homme-singe, malfrat, fier-à-bras; la totale.
Jusqu'à ce qu'il donne naissance au tueur-étrangleur nommé The Creeper, le temps d'une aventure de Sherlock Holmes ("The Pearl of Death", 1944, avec l'éternel Basil Rathbone dans le rôle du détective). Il le jouera canoniquement dans deux autres films (trois pour les non-puristes). A star was born...mais l'étoile brûlera le temps d'une comète. Ces deux films, Rondo n'aura jamais le temps de voir en salle avant sa mort, nais sa présence silencieuse, sa démarche lourde et sa voix caverneuse n'allait pas sombrer dans l'oubli.
Impossible de ne pas voir chez The Creeper le vestige des grands monstres de l'expressionisme allemand. Il en est même en quelque sorte la synthèse. Si la Universal grappillait alors allègrement des méthodes et des thèmes chez les maîtres germaniques, c'est avec les films qu'elle produisait le mettant en vedette que le tout devenait d'emblée flagrant. À la fois Césare, le tueur de "M" et le Gwynplaine de "L'homme qui rit", le Creeper a beau être un des premiers tueurs en série de l'histoire du cinéma (il est même l'exemple type du proto-slasher, n'ayant besoin que de ses mains pour tuer), il est aussi l'esclave de sa propre nature. Il ne peut s'empêcher d'étrangler les femmes et de briser la colonne des hommes. Comme le somnambule du "Cabinet du docteur Caligari", le Reinfield de "Nosferatu" et la Maria de "Metropolis", il est cet individu robotisé, réduit à la servitude par un despote manipulateur, une mise en garde contre la démesure et la mégalomanie des dirigeants. Un golem de chair, cruellement sculpté par la vie.
Volontairement ou non de la part des réalisateurs, à mesure que le Creeper évoluait, plus son histoire se confondait avec celle de Rondo; le thème de l'exploitation du monstre par un maître devenait indissociable de celle que connaissait Hatton au sein des studios. Il aura "choisi" de se laisser exploiter, ne voyant pas d'autres options. En ce sens, les deux derniers films réalisés en 46 juste avant sa mort, "House of horrors" et "The brute man", exercent un pouvoir de fascination supplémentaire. Certes, ce sont des films beaucoup plus subtils qu'ils n'y parait de prime abord mais on y voit aussi le début et la fin d'un envol. Des lors, il est impossible de ne pas y voir une manière de prophétie. Celle d'un homme dégouté de lui même mais dont la cage de chair sera aussi le seul refuge.
Depuis, le visage de Rondo est célébré dans une pléthore de médium. La culture populaire a su lui rendre l'hommage qu'il méritait. Il fut le méchant Lotharo dans "The Rocketeer",
Il est le "véritable" visage de Judge Dredd...
...et une statue porte désormais son visage, le Rondo Hatton Classic Horror Awards, un prix remis par un vote de public aux gens oeuvrant dans le milieu de l'horreur.
Cette semaine, Rondo Hatton, une analyse de ses films, une évocation de sa vie, une célébration de l'homme.
Well come back, guys! (Et merde, j'ai encore écrit en anglais ;))
RépondreSupprimerMerci camarade!!!
RépondreSupprimerUne belle émission les surhommes!
RépondreSupprimerIl y a quelque chose de très beau et très triste dans le fait que Hatton se fait "battre" au concours de laideurs dans The Hunchback of Notre Dame (1939) par Quasimdo / Charles Laughton. Victor Hugo, en quelque sorte, nous parle de Hatton dans cette scène du récit:
[…] il ne fallait rien de moins, pour enlever les suffrages, que la grimace sublime qui venait d’éblouir l’assemblée.
L’acclamation fut unanime. […] On en fit sortir en triomphe le bienheureux […] Mais c’est alors que la surprise et l’admiration furent à leur comble.
La grimace était son visage. Ou plutôt toute sa personne était une grimace.
Bonhomme, tes mots frappent au coeur!
RépondreSupprimerLes aminches, l'a-t-on signalé ? Le lien "Pour écouter cette émission, cliquer ICI." pointe vers l'émission du 16 Aout! Et maintenant, je rêve d'un film des Shaw Brothers avec Rondo.
RépondreSupprimerRondo Hatton fait un caméo dans le comics"MASKS" qui réunit le Frelon Vert et Kato,the Shadow,The Spider,Black Terror,Black Fury,le Lama Vert,Black Bat,the Cloak et le nouveau Zorro.
RépondreSupprimerKim Newman utilise the Creeper dans son livre sur MORIARTY où l'on croise aussi docteur Mabuse et Iirma Vep.