vendredi 23 mars 2012

Notre émission ici et maintenant: Alan Smithee-incantation pour un démon de l'image

Pour écouter cette émission, cliquez ici:


 Alan Smithee...
La plupart des cinéphiles connaissent déjà le nom. Comme le terme Macguffin, c'est un néologisme façonné de toute pièce par le cinéma et qui fait désormais partie de sa terminologie. Pour ceux qui ne sauraient pas qui c'est, Alan Smithee est le nom de rechange emprunté au générique par un créateur  qui n'est pas satisfait de son film, pour des raisons personnelles ou hors de son contrôle. Au tout début, le nom était surtout attribuable au réalisateur mais depuis, des acteurs, des scénaristes et des artistes provenant d'autres disciplines ont aussi employé le terme. À l'émission cette semaine, nous vous parlerons entre autre des nombreux films attribuables à ce nom.




Ça, c'est pour les "faits".
Ce qui nous intéresse ici, ce sont les conséquences occultes de l'existence d'Alan Smithee. Le 7ème se penchera cette semaine sur ces notions cruciales. Première véritable révélation obtenue au terme de nos nombreuses réflexions cinématoccultes à l'émission, après l'invention de notre Tarot de la Lanterne magique, nous commençons à former une dialectique plus raffinée de notre pratique, des rituels précis, une cosmogonie. Il se cache désormais quelque chose de sinistre et fascinant derrière ce nom que les nombreux créateurs frustrés et déçus n'auraient jamais pu prévenir. Smithee attendait, tapis dans l'ombre, d'être révélé par la lumière du cinéma. Ils ont tous invoqué, incarné une entité. Alan Smithee existe. Il n'a peut-être pas de corps, mais l'entité, avec ce qu'elle a de colère, de déception et de peine, est vraisemblablement existante. Nous avons fait le test: Smithee a désormais tous les attributs d'un démon qu'il est possible d'invoquer et il est maintenant capable de s'infiltrer dans notre monde par ses propres moyens. Sans le savoir, des réalisateurs ont des visions de lui en rêve, en songes et sans trop pouvoir l'expliquer, il le laisse s'incarner corporellement à l'écran, c'est d'ailleurs sa principale méthode d'infiltration dans la réalité consensuelle. Smithee a toujours existé, mais depuis 1967, année précise de sa confirmation, sa puissance s'est affirmée, tel qu'en témoigne ses apparitions de plus en plus nombreuses, principalement chez des réalisateurs ayant emprunté ouvertement son nom.




Dès 1943, des apparitions furtives...chez Maya Deren, prêtresse vaudou renommée, dans son film Meshes of the afternoon. Deren, sans pouvoir le comprendre et avec la sensibilité magicke qu'on lui connaît, avait déjà pressenti sa présence. Comme Dionysos et Choronzon, évocation du chaos et de l'abysse, sa forme est changeante, difficile à saisir.


Il fait une bouleversante apparition au tout début de Wild Strawberries d'Ingmar Bergman.
On le retrouve également à profusion dans Jacob's ladder d'Adrian Lyne. C'est le conducteur du métro qui risque d'écraser Jacob...
...et le passager d'une voiture.


Dans Stuck on you, des frères Farelly, on peut l'apercevoir son visage sous un lit, observant le spectateur. C'est vraisemblablement chez Lynch qu'il fait son apparition la plus troublante. Dans Inland Empire, il est protéiforme et fuyant.


Nommer les choses, c'est leur donner de la puissance. Alan Smithee est là pour rester.

Pour écouter l'émission cette semaine, cliquez ici.

Frères et soeurs cinéphiles; si jamais vous avez apercus Alan Smithee dans un film un jour, faites nous le savoir. Nous tentons d'établir une liste aussi exhaustives que possible de ses apparitions.
Nous vous en serons éternellement reconnaissant.

lundi 20 février 2012

Notre émission du 19 février: JOE LE TAXI? (JOE VS TAXI DRIVER)

Cliquer ici pour nous écouter cette semaine


Mon existence de cinéphile compulsif m'aura appris quelque chose de précieux, de vital même, sur la relation qu'entretient l'homme avec la culture: aucune oeuvre, aucun film, même la pire enflure ayant tachée l'écran par sa seule existence, ne gagne pas à être vu une seconde fois. Au risque de me prendre pour Zizek, avec un léger changement de sa parallaxe, un infinitésimale déplacement de ses repères intellectuels, on peut conférer à un navet la saveur d'une fraise (wow je suis en FEU). 

La vie est courte et il faut bien faire des choix. Cependant, si vous partagez le moindrement du monde mon opinion, entendons nous sur le fait que voir à outrance un grand film peut parfois avoir un effet surprenant. 

Prenez dans mon cas TAXI DRIVER, par exemple...
Le film de Scorcese ne fait pas partie a priori de mes films préférés. Pourtant, je l'ai regardé une bonne dizaine de fois, sans trop m'expliquer pourquoi. À toutes les fois où je revois ce film, équipé d'un bagage idéologique fluctuant, je constate que c'est un tout autre film, tour à tour réactionnaire, pathétique, onirique, inspirant. Je ne pense pas que je suis le seul à qui Taxi driver fait cet effet, par ailleurs.


Je suis d'avis que le film a  pincé une corde sensible énorme sur une quantité de sujet et que pour cette raison, les cinéphiles se poseront souvent la même question: Taxi driver à t'il un ancêtre et un successeur? Certes, l'influence du film se fait sentir encore énormément à ce jour. Un exemple à la volée; le Rorschach du Watchmen de Zack Snyder qui, le temps de quelques scènes, devient le Travis Bickle de cette uchronie...

"June 29th: All the animals come out at night - whores, skunk pussies, buggers, queens, fairies, dopers, junkies, sick, venal. Someday a real rain will come and wash all this scum off the streets. I go all over. I take people to the Bronx, Brooklyn, I take 'em to Harlem. I don't care. Don't make no difference to me. Listen, you fuckers, you screwheads. Here is a man who would not take it anymore. A man who stood up against the scum, the cunts, the dogs, the filth, the shit. Here is a man who stood up""Rorschach's Journal. October 12th, 1985:Dog Carcass in alley this morning, tire tread on burst stomach. This city is afraid of me. I have seen its true face. The streets are extended gutters and the gutters are full of blood and when the drains finally scab over, all the vermin will drown. The accumulated filth of all their sex and murder will foam up about their waists and all the whores and politicians will look up and shout 'Save us!' And I'll look down, and whisper 'no"




Cette semaine nous parlons de l'héritage de Taxi driver, des tentatives de lui laisser une succession. Nous le comparons également à son cousin éloigné: JOE de John G.Avildsen. 
Joe est en quelque sorte la genèse de Taxi Driver, un brûlot particulièrement efficace réalisé 6 ans plus tôt qui annonçait la venue d'une nouvelle génération de réalisateurs américains, mais qui exprimait aussi  leur malaise et leur colère, autant pour leur société que pour le cinéma de la génération précédente. Impossible que Schrader et Scorcese ne l'ait pas vu. Même si le film du réalisateur de Rocky est aujourd'hui à peine culte, il eu l'effet d'une bombe idéologique à sa sortie (rappelons aussi que le comédien  Peter Boyle tiens un rôle similaire dans le film de Scorcese)

L'interprétation inoubliable de Peter Boyle changera à jamais sa vie, ne serait-ce que parce qu'il tentera par la suite de ne plus jamais interpréter de personnage semblable. Joe carbure à l'ignorance, la peur, le refoulement et la haine. Un gars normal quoi, tout ce qu'il y a de plus banal. Comme plusieurs de vos voisins.

Que reste t-il de Joe? Le film a t'il encore de la pertinence? Un chose est certaine: en le voyant juxtaposé à Taxi Driver, les deux n'en deviennent que plus pertinents. 

dimanche 12 février 2012

Notre émission du 12 février: Brian Yuzna et son SOCIETY (1989)-un soap opera grand-guignolesque contre les dangers de la conformité

Cliquez ici pour écouter notre émission

Après une trop longue période d'absence, le 7ème revient enfin poser ses pénates hebdomadaires juste pour vous les aminches!

Votre émission préférée sera désormais un rendez-vous dominical; nous serons avec vous à partir de 11 heure à tous les dimanches. C'est approprié quand on y pense non? Nous serons officiellement, canoniquement même, une célébration religieuse. Nos voies sont cependant plus pénétrables que celles du père. Mais bref...

Cette semaine, parce qu'il était temps que nous le fassions, une émission toute fraîche sur un des plus ardents artisans du bis, Brian "The Brain" Yuzna. On ne trouve plus beaucoup des cinéastes comme lui et c'est une chose qui doit se célébrer. Producteur, réalisateur, scénariste, capable du pire et de l'encore pire, on lui doit des moments de bravoure avec des rottweilers cyrbernétiques, des dentistes psychopathes, des zombies libidineux, des fiancées pourrissantes, une abyssale adaptation de comic et une poignées de petits moments d'horreur juste assez piqués des vers. 

Mais on lui doit aussi SOCIETY, son tout premier film. 

Et ça, c'est une autre paire de manche. C'est de cette surprise de taille que vous parlera le 7ème en particulier cette semaine...

Dans un Berverly Hills tout ce qu'il y a de plus cossu des années 90, Bill, un jeune homme à qui tout réussi se prépare à une digne avenir de bourgeois. Ses parents sont riches et impeccables, sa majorette de copine est belle et bien blonde. Il est le capitaine de l'équipe de foot et le président du conseil étudiant. Ça n'empêche cependant pas Bill d'être traversé d'angoisse sur le sens de sa vie et de consulter régulièrement un psy. Et si l'existence  n'était pas ce qu'elle parait? Si la conformité était si chouette et simple que son entourage se tue à lui expliquer, pourquoi Bill est t-il constamment dérangé par des visions grotesques de ses proches? En sombrant dans la folie, Bill se rapproche d'une vérité qu'il aurait été préférable de ne pas connaître mais qui était aussi inéluctable...

Tout dans SOCIETY est directement sortie d'un soap opera: la réalisation, la musique, l'interprétation des acteurs, dont plusieurs proviennent directement de ce milieu.  Un vrai coup de génie: volontairement ou non, en utilisant une ambiance de soap opera pour parler de l'angoisse de la conformité, Yuzna parvient à déconstruire le genre et à lui conférer des inflexions grotesques. On est dans le terrain voisin et lointain des meilleurs Lynch, qui s'est souvent prêté à cet exercice où il est question de révéler le caractère profondément inquiétant de cette réalité fabriquée, pourtant si proche de la notre. On est aussi à quelques bornes des premiers Cronenberg, où les angoisses de la conformités peuvent s'incarner dans la chair et faire subir de bien outrageuses triturations au corps. 

Sous ses accents grand-guignolesques, SOCIETY cache bien son jeu. Il est bien au delà du simple film d'horreur psychotronique. Le premier film de Yuzna est une charge subversive contre la bourgeoisie américaine ordinaire. What's not to love? 

http://www.youtube.com/watch?v=sEzMMJSkEHE

jeudi 19 janvier 2012

Notre toute première émission de 2012: Bilan à saveur sociologique de l'année 2011-La fin du monde et quelques sauveurs

Cliquer au choix sur un des 4 chevaux de l'Apocalypse pour écouter notre première émission de 2012!

Ben voilà les aminches!


Après un hiatus pas permis de presque un mois et demi, vos emmerdeurs préférés sont de retour pour vous chatouiller les enclumes...fuck yeah. Fallait bien se ressourcer. Done. Go.

Un bilan pour 2011? Mais bien sur! Mais comme à notre habitude, pas question de simplement faire un top 5, ou de parler des grands films et des honteusement oubliés. Nope! 

L'est question d'évaluer selon un angle sociologique, si si,  ce que la production cinématographique de l'an dernier a eu de pertinent à dire sur l'état de notre civilisation, rien de moins. 

Parce que Malick, Trier  et Tarr ont parlé de fin du monde...respectivement, avec des dinosaures, Kristen Dunst et, comme le disait Gerry Boulet, pour une dernière fois. C'est totalement saugrenu quand on y pense! 


De plus, question de nous sauver de l'eschaton, y'a eu des petits Jésus partout; quand ce n'est pas Branagh avec son Thor de plastique, c'est un anti-héros en bummer argenté dans une bagnole qui fait la gueule...et des chevaux.

Bref, c'est la fin des temps, et on veut quelqu'un pour nous sauver tout en nous divertissant! 

Quelle année étrange! Quelle année magnifique!

vendredi 23 décembre 2011

En célébration

Voici que la semaine achève, notre première semaine de vacances sans émission et sans comptes à rendre à personne. Je l’ai passé en sous-vêtement à jouer au Sega Genesis (console de plus de 20 ans) et que j’en vois pas un me juger là-dessus. C’est aussi durant cette semaine que l’univers se met d’accord sur une chose et cette chose doit être vécue dans l’impératif le plus absolu : c’est la fête de Francis, nous devons donc lui faire des offrandes digne d’un héros mythologique au casque d’or, ou à la cuisse légerte ça dépends à qui tu le demande. 

Chaque année nous revisitons les classiques : une peau d’humain tué (et tamisé) pour que Frank puisse se coucher dessus comme un pin-up sexy, un mouton à l’haleine chaude qui puisse souffler sur son front pour préserver sa chaleur ou un long bâton de bois avec les trois premières phrases du Quran inscrites dessus. Seules les offrandes les plus redondantes seront escortées à la porte car ceci est plus qu’un amoncellement de lettres forgeant un texte de qualité (argumentable), les mots qui s'approchent sont une offrande, comme du beurre clarifié que l’on coule sur le dos de Ganesh, que je fais à mon pote Francis. Cette offrande est publique, car à la manière d’une cérémonie faite en groupe, je crois fondamentalement que les hommages qui sont fait en publics propagent un plus grand sentiment de sacré. La prière isolée, comme celles que nous faisons toutes les semaines à Choq.fm, rempli la nécessité de son usage mais ici nous offrons quelque chose pour un des plus illustres des bipèdes. Trève de demi-mesure, the dude deserves the whole shebang!

Alors moi, qui n’a plus rien à offrir d’autre que ce qui est fabriqué de mes mains Tchekhoviennes et mon esprit galvaudé aux jujubes, je me suis mis les mains au jeu. Que l’inspiration des muses viennent gratter de la neige en face de chez nous à cinq heures du matin, je me réveille et offre ici une tergiversation typiquement 7eim antiquairiesque dans laquelle nous ferons l’analyse d’une pochette, mais pas n’importe quelle pochette, aujourd’hui nous parlerons de Mammuth de Benoît Delépine et Gustave Kervern.

Pour la petite histoire sachez que c’est durant l’année 2011 que le Francis Ouellette à commencé un emploi qui, pour moi, faisait amplement de sens considérant son talent pour la jonglerie symbolique, responsable de DVD pour FunFilm, Francis s’est vu daigner la responsabilité de la conceptualisation des pochette de films de la boite de  distribution, Mammuth n’est pas un sujet d’analyse anodin chois par hasard ou parce qu’il venait soutenir mes propos correctement, non. Mammuth est le tout premier film dont lequel Francis était entièrement responsable. Le DVD que je tiens dans mes mains est (un travail de longue haleine porté par plusieurs braves gens qui travaillent avec acharnement pour rendre ces titres disponible pour un public québécois) un produit 100% Frank the Bear (parce que oui : y’a un petit ours sur la pochette).

L’analyse qui suivra tentera de démontrer hors de tout doute que pour son premier DVD, Francis s’est donné dans toute sa splendeur symbolique pour livrer une présentation qui synthétise tout les grandes thématiques du film mais qui sert aussi comme rappel à son créateur. Dans les années à venir, lorsque des robots arriverons sur la terre glaciale et tenterons d’analyser les œuvres de ce cher fils de la Gaspésie ils découvriront que la clé de voute de toute sa création se retrouve dans cette pochette.   



Premier point d’analyse : Francis est Depardieu, mais pas vraiment Depardieu mais plutôt le rôle le plus important que Depardieu à eu de sa carrière. Francis est Cyrano de Bergerac. Maître de l’usage de la langue et des hanches, Francis Ouellette porte le masque divin de Cyrano. La filiation entre les deux hommes se manifeste par une présence plus grande que nature. Malgré que Depardieu est maintenant parfois vu d’un œil peu flatteur, il inspire toujours autant l’immensité de l’âme du bon vivant, les deux hommes vivent avec une force d’existence alimentée par l’art, je crois que d’avoir Depardieu comme tête d’affiche n’est pas un hasard, comme cette première arcane que l’on utilise pour entreprendre un voyage, Depardieu sert comme père spirituel, un homme qui n’a pas d’égal et qui sert comme incarnation d’un autre homme qui habite Môsieur Francis : Honoré de Balzac. (Ouf je suis allé loin avec celui-là, allez voir des photos des sculptures de Rodin, c’est un peu weird comment les deux se ressemblent dans leur posture.)


Deuxièmement : Mammuth lui-même, qui désigne la monture et le personnage en même temps, dans le cas de notre cher « roasté » nous pouvons appeler Francis « Bixi » Ouellette. Fuckin’ A.

La pochette est aussi un usage fort d’un des premiers préceptes filmiques que Francis m’a légué. L’usage de la direction du parcours pour représenter la quête du personnage. Je sais de source sûre que Frank regarde beaucoup les transitions horizontales qui se font dans un film car, comme il me l’a dit une fois : Un personnage qui roule en direction droite symbolise l’avancement, si le personnage roule vers la gauche, sa quête en est une de régression.

Regardons les grands exemples :

En plus d’avoir un Depardieu qui se dirige vers le passé (vers la gauche), voilà que notre cher Francis a habilement ajouté l’image de feuilles qui s’envolent au vent du déplacement  du personnage. Nous voilà avec un très beau double message rempli de sens. En mettant les deux figures ensemble on suggère que non seulement Mammuth recule vers son passé mais en faisant cela il se débarrasse aussi des mémentos de son vécu. Comme un Ishtar bedonnant, Mammuth revisite sa propre narrative tout en se débarrassant du poids de son passé, il se réinvente en conservant ce qui lui sera le plus utile sur sa route : le souvenir. Le voyage étant tout ce qui compte pour notre personnage, les traces de son histoire ne semble guère le préoccuper. C’est l’histoire qui compte, l’intériorisation des évènements et la possibilité de les avoir au bout de doigts et non pas empilés dans une commode. Le souvenir est la plus belle trace, sans trace, qui existe.

Pour un film qui met à l’affiche Gérard Depardieu, Yolande Moreau, Isabelle Adjani et une chick qui s’appelle Miss Ming. Ajoute Francis là-dedans et t’a un casting Francophile de The Expendables. Si Frank avait un strike-team à monter pour une dernière mission, on peut être sur qu’elle compterait ces gens et peut-être Isaach de Bankolé.

Nous savons aussi fort bien que tout homme féru d’occultisme comprend l’importance de l’élément caché in plain sight. En véritable coup de théâtre derrière la première image, celle de la première impression, Francis nous ajoute une seconde image, plus large cette fois-ci qui sert de deuxième et troisième de couverture. Cette image, qui n’en est pas moins symbolique mais qui, cette fois-ci, évoque plus de sensations que de réflexions. L’image de l’intérieur, un Gérard qui semble géant avec son petit verre de blanc semble inconfortable à l’idée d’être vu, d’être pris en photo, nous avons à l’intérieur de la pochette un Mammuth plus intime qui a la pêche devant un honneur qu’il ne croit pas mériter. Son bras est aussi levé, en guise de protection. Si l’extérieur de la pochette nous présente avec un buffet réflexif, un assemblage intelligent de symboles à déchiffrer, l’intérieur, comme l’homme, est rempli d’une émotivité touchante et gênée. En ouvrant la pochette, il y a des sourires, des regards fuyants, des véritables camaraderies, des strates que l’on porte pour se protéger, des chips pis de la piquette. C’est aussi un lieu de regard vers l’extérieur car le groupe, regardant le photographe, nous regarde aussi, on sourit à moitié mais on est d’abord et avant tout inconfortable avec l’autre qui vient s’immiscer dans notre quotidien sans invitation. (je clos ici, le festival de la virgule)

Quand à sa thématique, la quête immense et Quichotesque d’un homme qui réclame un peu de cohérence dans son environnement, reçu par plus de chaos et de non-sens à chaque pas qu’il entreprend dans son voyage englobe plusieurs « dadas » de notre cher ours. La défaite de la bureaucratie Kafkaesque, l’inconfort des rapports sociaux (« vous avez quelque chose juste-là ») de  Muthafuckin’ LD et le culbutage dans les toilettes publiques sont des archétypes typiquement FrankOuellettiens (à ne par confondre avec la poésie FrankEtiennenienne)  et la scène (à la césure)  va sans dire si vous avez rencontré l’ours.
C’est avec moult analyse que j’arrive à la conclusion que la maxime « Un bon artiste copie, un grand artiste s’approprie » s’agence parfaitement bien avec le point que je tente de faire ici. Mammuth, malgré qu’elle soit l’œuvre de Benoît Delépine et Gustave Kervern, s’est véritablement fait intériorisé par le dude qui à pensé la pochette. Ce grand artiste de la verve iconographique s’est approprié cet œuvre et à pressé..wait for it…wait for it…la substantifique moelle du récit pour synthétiser les images les plus puissantes du film qui sont aussi un réflexion de l’homme qui en à fait l’agencement. On dit aussi que quand Paul parle de Pierre on fini par en savoir plus sur Paul que sur Pierre, allons voir ici que quand Francis Ouellette conçoit une pochette pour Gérard Depardieu on en comprend plus sur Francis que sur Gérard.  L’artiste ici se camoufle habilement, il laisse les symboles crier le nom de leur maître d’orchestre.

PS. Ah oui, y’à aussi la ligne « D’ailleurs…j’ai eu l’idée de faire un CV, avec du papier de toilette et le sang de mes règles ». Je crois foncièrement que Francis aurait voulu l’écrire cette ligne-là. 

samedi 10 décembre 2011

Notre émission du 7 décembre: ????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????

Notre saison 2011 tire bientôt à sa fin. Avant de terminer avec notre traditionnelle émission de cinéma de Noël, nous avons décidé de faire un échange de cadeau cinéphilique en onde. 
Je ne sais pas de quoi Jim va parler, il ne sait pas non plus ce que je vais évoquer.  Ce sera une surprise. Chose certaine, nous allons faire découvrir à l'autre un film magnifique dont l'autre n'a jamais même entendu parler et qu'il se doit de connaître. Par le fait même, on vous en fait cadeau à vous aussi, chers auditeurs.  Il est quasi impossible que vous ne fassiez pas au moins une découverte. 

Notre émission du 30 novembre: THE DEAD, dernier film de John Huston.

Pour nous écouter cette semaine, cliquer ICI
Regardez les sillons de ce visage. Ça n'a plus rien à voir avec des rides. C'est un paysage, ce sont des routes creusées par les souvenirs et les larmes. J'aime les visages comme ceux là, aux anfractuosités tellement riches qu'elles exigent une certaine topographie, un visage d'homme d'une autre époque, comme il s'en creuse de moins en moins de nos jours. 

John Huston a littéralement tout fait. Du cinéma, il est le pendant de Theodore Roosevelt et de Hemmingway. L'homme a vécu une vie riche et ample, comme plusieurs d'entre nous peuvent seulement en rêver, mais il avait la charpente, l'âme et les épaules pour pouvoir mener sa propre épopée jusqu'au bout.

C'est ce qui rend le dernier film de Huston un trésor inestimable. Filmé alors qu'il était mourant, THE DEAD est le dernier message d'un géant, les braises d'un homme qui a brûlé au maximum ses années. Avant de s'éteindre, Huston plonge dans sa conscience, il parle une dernière fois de ce qu'il a appris et de ses passions: James Joyce, l'Irlande, sa famille, les racines, la terre. 

Notre émission cette semaine parle de sa vie et de son dernier film, de l'Irlande et de Joyce, de la pluie et des souvenirs. 


mardi 29 novembre 2011

Notre émission du 16 novembre: Docteur Jekyll et Mister Hyde-la créature la plus importante de l'histoire du cinéma?

Cliquer ICI pour écouter notre émission sur le sujet
Vous excuserez la formule pompeuse et péremptoire de notre émission cette semaine. N'en demeure pas moins que la question mérite d'être posée. 
Il est tout a fait normal que le cinéma ait fait de Dracula et du monstre de Frankenstein un duo complémentaire. Cela dit, même dans ses incarnations modernes, Dracula reste une glorieuse relique qui n'a que très peu de chose à dire sur son époque. Le monstre de Frankenstein est une figure résolument moderne. La création de Shelley était faite sur mesure pour le cinéma. Le 7ème art n'est-il pas lui même une créature composite et morcelée, longtemps à la recherche de son créateur? Pas surprenant que la première adaptation au cinéma nous provienne d'un autre savant fou et mégalomane, Edison, le "père" du cinéma. (cliquez sur l'image du bas pour écouter notre émission sur le monstre de Frankenstein au cinéma)
Toutes les problématiques de la science moderne sont engoncées dans  le monstre de Frankenstein: génétique, éthique des expérimentations, quête d'immortalité, acharnement thérapeutique.

Le 7ème a toujours trouvé que Dr. Jekyll et Myster Hyde faisait pour la psychologie, la psychiatrie et la psychanalyse ce que le monstre de Frankenstein faisait pour la science et la médecine. En fait, Mister Hyde est d'emblée une créature de pure modernité, complémentaire à Frankenstein. Les thèmes parlent d'eux même: toxicomanie, répression des pulsions, meurtres en série, dédoublement de personnalité. Lutte des classes également

Cette semaine, nous faisons un survol personnel de nos adaptations préférées, de la première à la dernière, des grands inconnus. Son évolution a travers les décennies, ses incarnations modernes. 
Des origines, avec John Barrymore en 1920... 
Jusqu'aux adaptations improbables... Une surprise de taille: un blaxploitation de William Crain, réalisateur de Blacula, intitulé Dr.Black, Mr.Hyde (1976). Savoureuse ironie, le film de Crain, volontairement ou non, remonte aux sources de la nouvelle de Stevenson avec beaucoup plus de pertinences qu'on pourrait ne  le croire. Il remonte aux fondements même du cinéma, en empruntant par ailleurs beaucoup à King Kong (Tarantino aura pris ça là, c'est clair!) 

Ken Russell: Bye bye black bird!


Merci, Ken Russell, 
Pour les nombreuses leçons de cinéma et de désobéissance que vous nous avez donné. Merci Mr.Russell, pour l'indicible humanité de THE DEVILS, la chaleur d'une scène de lutte dans WOMEN IN LOVE, celle d'une nuit d'orgie dans GOTHIC, pour votre amitié avec Oliver, que j'imagine être le Klaus Kinski de votre Werner Herzog, pour avoir refait la tragédie grecque avec un Pinball machine...
 
Et surtout, surtout, merci pour les pérégrinations intérieures du Dr.Jessup dans ALTERED STATES. 
Oliver vous attend quelque part avec une grosse pinte (que dis-je, une dizaine de stout dont la broue sont des nuages gorgées de tempêtes...

Jim et Francis

dimanche 13 novembre 2011

Notre émission du 9 novembre: Death bed:the bed that eats-le chef d'oeuvre inconnu

Cliquer ici pour écouter notre émission cette semaine

Cette semaine, le 7ème antiquaire vous fait visiter la section du lit.

Le lit.

Théâtre à la fois vaste et étouffant de nos plus grandes tragédies, de la naissance à la mort, du plaisir à la souffrance.

Le lit.

Une porte vers l'autre monde, peuplé à la fois d'anges et de démons. L'embarcation, le véhicule. Le mince voile, la large voile  dans lequel on se couche et se cache.

Le lit.

Avec ses monstres en dessous, Morphée au milieu et une foule au dessus.

Le lit au cinéma.

Endroit horrible oû les cauchemards prennent vie. La petite Regan Mcneil attachée. Jason Vorhees en dessous. Freddy Krueger dans le matelas. Les portes de l'enfer maculées  de  Hellraiser.
Espace d'exploration des fantasmes. Le monolithe de 2001, lit de camp de tous le genre humain.

Au cinéma, le lit n'est jamais simplement un lit. C'est encore et toujours le rideau du théâtre des rêves.
Il y a eu beaucoup de lit au cinéma, mais aucun de plus profond que le DEATH BED de George Barry.
Chef-d'oeuvre inconnu d'une surréalisme sans compromis, DEATH BED: THE BED THAT EATS fait avec le lit ce que L'ANNÉE DERNIÈRE À MARIENBAD faisait pour la villa. Le film de Barry est sans aucun doute  la plus puissante méditation existante sur l'onirisme au cinéma: le montage elliptique et traversé de non-sequitur, la grinçante musique protoindustrielle, le jeu décalé des personnages, les couleurs rappelant le Bergman de CRIES AND WHISPERS.
Mais surtout, ce lit possédé d'un démon qui fut jadis un arbre et une brise, puni d'avoir trop aimé, qui mène une guerre à un esprit enfermé dans une peinture.
DEATH BED et son lit sans fond menant vers un enfer gastrique oû tout est digéré, les rêves, les gens et les aliments.
DEATH BED le chef d'oeuvre oublié d'un artiste consummé par ses propres cauchemars, une Gérard de Nerval de la pellicule.