vendredi 27 février 2009

Geek Chronique no.0.3 :Who Will be watching the Watchmen?

En tout cas pas Alan Moore, on le sait maintenant depuis un bon bout de temps.


Il n'a pas grand chose à dire sur ce blogue à propos de Watchmen, le film ou le comic book, qui n'a pas été dit ailleurs. En outre, nous avons couvert largement la question dans une autre émission, spécialisée sur la pop-culture, Les Mystérieux étonnants, que vous pouvez trouver ici.

Cependant, il est fascinant de lire des gens débattre du sujet dans La Presse dans un article de Jozef Siroka, alors que l'incontournable fièvre est à son comble. Le débat sur la légitimité de la bande dessinée en tant que forme d'art sera évidemment au goût du jour. Il suffit de lire les commentaires allumés des usagers pour constater à quel point le sujet tient à coeur.

Ce qui est le plus amusant, c'est de constater dans les propos d'Alan Moore lui-même une mauvaise foi de circonstance, assurément entretenue de toute pièce par son dégoût pour l'idée du film, le poussant jusqu'à changer son opinion sur le médium du comic:

"Ce n’était jamais mon intention de démarrer une tendance «sombre». […] Mon but était de faire des comics qui pourraient attirer un garçon de 13 ans ainsi que l’homme de 40 ans qui a du temps à tuer. Je voulais faire des comics accessibles au plus grand nombre possible, mais qui resteraient tout de même intelligents même s’il s’agit essentiellement d’histoires d’aventures pour enfants"

Si vous connaissez le bonhomme, si vous avez lu avec gourmandise ses créations, vous savez autant que nous qu'il ne pense pas ça. Des dizaines d'entrevues et de textes existent où il dit littéralement le contraire. C'est sa manière de se dissocier d'un médium qui devient l'apanage d'un public grandissant et c'est d'abord et avant tout cet aspect qui le rebute. Plus de films adaptés de comics se feront, plus l'archétype du super-héros prendra de la proéminence. Moore redoute au plus au point que le comic devienne le vecteur encore plus spécifique de cet archétype, lui qui tente d'expérimenter d'autres avenues avec le médium depuis des décennies.

Le film, peu importe sa qualité (les critiques que l'on peut lire actuellement sont plutôt encourageantes), fera probablement entrer par le grande porte un archétype qui hante le culture populaire américaine depuis plus de 80 ans mais qui est trop souvent considéré comme le propre du fantasme adolescent. Oui, Dark knight a amorcé cette ascension, mais il y manquait quelque chose; un véritable Surhomme, aux pouvoirs démesurés, un demi-dieu, une créature exaltant la légende. Il y manquait un Dr.Manhattan. Le super-héros n'est rien de moins qu'un totem, une lentille de perception culturelle grâce à laquelle l'auteur et le lecteur évalue les rêves et les craintes de son époque. N'en déplaise à Moore, qui reste au demeurant un des plus grands auteurs du 20ème siècle, toutes formes confondues, le film engoncera plus que jamais ces considérations dans l'inconscient collectif, ce qu'il essaye de faire depuis plus de trente ans. Qu'il le veuille ou non, il a gagné sa bataille.

Everyone will be watching the Watchmen.

(Trois semaines se sont passées depuis l'écriture de ce texte. Je me suis amèrement trompé. Ma satisfaction de cinéphile et bédéphile est totale. Le public n'a pas suivi...le film est un échec commercial. Tant pis pour vous.)

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