Ne partez pas sans elle...c'est pas comme si vous aviez le choix.
Il m'arrive fort souvent de m'interroger sur mes tendances sociopathiques en tant que cinéphile. Au cinéma, j'ai très souvent soif de voir le plus large éventail possible de bassesses humaines, qu'elles soient raffinées ou vulgaires. Comment se fait-il qu'un individu de nature essentiellement douce et débonnaire tel que moi soit si satisfait par la démonstration de la cruauté à l'écran? Est-ce justement parce qu'elle me paralyse dans la vie? Est-ce parce que j'ai besoin de la banaliser en la regardant dans un judas, de me blinder pour mieux l'affronter in the flesh? Suis-je insensibilisé, le pur fruit confit de notre époque briochée par le sucre du voyeurisme?
Ces questions me taraudent constamment quand je sens l'appel du voyeurisme. Et ces questions, je me le pose toujours avec urgence en regardant le film de George Sluizer, "The Vanishing".
Le film de Sluizer représente pour moi, dans son propos comme dans son insidieuse structure, un véritable parangon de cruauté. Des années avant "Irréversible", "The Vanishing" explorait avec une pertinence autrement plus vicieuse les plaisirs pernicieux de voir l'autre souffrir. Voilà donc un film qui osait proposer une prémisse de toute évidence hitchcockienne mais en y évinçant les artifices cinématographiques habituels. Du coup, la cruauté du film se vit dans une intimité peu commune, presque choquante de banalité. Le 7ème antiyquaire redécouvre ce film des années plus tard et constate qu'il avait beaucoup de Haneke là-dedans.
Cette semaine, le 7ème te parle de cruauté, de Bernard Pierre Donnadieu, de stations services et de la banalité du mal.