Hey girl, c'est Jim!
Vous aurez
bien remarqué que nous avons pris congé la semaine dernière afin de laisser
place à une ancienne émission qui parlait des adaptations de FANTÔMAS de
Louis Feuillade. On a fait ça simplement parce qu’on préparait une émission
substantifique sur JUDEX qui est, en quelque sorte, sa contrepartie bénéfique.
C’est
plate, mais c’est d’même et du coup ça nous offre l’opportunité idéale de
sortir de notre canevas habituel et de capitaliser sur l’absence d’émission
pour parler d’un autre truc, lancé il y a deux semaines au Planète BD.
LA COLÈRE
DE FANTÔMAS tome 1
Après
plusieurs lectures, je me dois maintenant d'avouer mon appréciation unilatérale
pour l’œuvre de Bocquet/Robillard, qui attire le lecteur avec la force
incontrôlable de l’interdit. D’autant plus que c’est à travers les pièges que
l’œuvre m’a tendu, à travers les intrigues et le sentiment de danger que mon
affection a gonflée jusqu'à ce que j’oublie que j’ai relu le livre plusieurs fois depuis. À l’image du personnage, qui tend des pièges pour
capturer ses proies, je crois que le premier tome de cette trilogie m’a capturé à l'aide de pièges forts et efficaces. À l’image de son protagoniste
charmeur, je me suis retrouvé ensorcelé par le charme de ce Fantômas. Voici, de
façon élémentaire, les pièges que j’ai pu débusqué dans le livre; j’en compte
trois mais je suis certain que vous en trouverez plus. Et ne vous gênez pas pour nous le faire savoir!
Les trois
pièges de Fantômas:
En premier
lieu, le titre est une promesse quasi jouissive attribué un personnage si cruel.
Déjà, le simple fait de pouvoir retourner et revivre de nouvelles aventures de Fantômas est
une opportunité en or... mais se faire promettre SA COLÈRE évoque un
titillement sadique presque incontrôlable. Après avoir été témoin de sévices
impensables de la part du personnage, le lecteur ne peut qu’être dangereusement
attiré par l’annonce d’une mise en scène de l’humeur la plus massacrante du
personnage. Et voilà, le premier piège du livre, la première annonce sans équivoque qui
nous indique que si nous possédons un tantinet de sens, on devrait se douter
que la colère d’un tel personnage sera forcément cataclysmique. C’est ce
qui rends l’histoire d’autant plus captivante; le fait de VOULOIR voir cette
colère se manifester devant nos yeux (et je ne vous gâche rien en avouant qu’elle
vaut amplement la peine d’être vue!!!)
Ce qui
m’amène évidemment au deuxième piège qui est, hors de tout doute, l’esthétique de l’œuvre. Comme un prédateur efficace ou une plante carnivore, nous
savons tous que les couleurs vives et les courbes lascives décèlent toujours le
plus grand danger. Le fait d'attirer, tranquillement et de façon hypnotique, le lecteur à
coup de MAGNIFIQUES illustrations est sans aucun doute le deuxième piège de Fantômas
(et de Julie Rocheleau en conséquent). Ces grandes illustrations, fortement inspirées des couvertures de romans de Souvestre et Alain avec
une mixture de ténébreux parfaitement mesurée, viennent attirer le lecteur à
plonger dans l’univers de Fantômas, une invitation alléchante qui comporte son
lot de danger. Les yeux fermés ou même grands ouverts, les cascades de sang qui
tranchent les cases et même les queues de phylactère qui s’entrecroisent de
manière sinueuse comme la fumée furtive d’un fusil fumant accrochent à
merveille.
Du coup, le
troisième piège de l’œuvre, c'est que Fantômas semble enragé d’être manipulé
médiatiquement, furieux du fait que l’on utilise sa figure pour faire des films
et même écrire des livres. Une idée de génie que d’avoir lié le personnage à ses
adaptations filmiques et même d’avoir rendu le fameux Fantômas offusqué par le
fait que certains producteurs capitalisent sur son histoire. Cette strate méta réflective du personnage qui frappe violemment ceux qui osent exploiter son
mythe (et donc de pervertir la construction de son personnage) m’apparaît comme
l’une des innovations les plus intéressantes offerte à la légende de Fantômas.
À la manière de ce qu’Alan Moore proposait avec "League of extraordinary gentlemen: black dossier (dont Fantômas faisait
parti, dans sa version Hexagonale) Fantômas devient donc un personnage
« plus que réel » qui émerge des pages du livre pour venir menacer
l’auditeur (et ici le lecteur simultanément) qui ose consommer les œuvres
écrites sur lui à son insu. Certains lecteurs, dont moi, ne peuvent ignorer la
frousse qu’une telle observation peut causer. Chaque page tournée du livre est
accompagnée d’une certaine réticence de continuer la lecture car la menace de
l’assassin plane continuellement...Et si le vilain lui-même était
offusqué que je lise ce livre en cet instant bien précis? Peut-être que la
colère de Fantômas s’abattrait sur moi, juste ici…maintenant…pendant qu’il
s’approche tranquillement derrière moi!
De plus,
ce Fantômas est présenté comme un être qui peut être partout
simultanément, un homme à mille visages et aux mille incarnations qui nous
rappelle la terreur toute contemporaine qui accompagne les "menaces" bien concrètes des
celle d’Anonymous. Aucune personne n’est hors de danger ni trop loin pour
être agrippé par sa longue poigne. Il
est omniprésent, inquiétant et il est présenté avec brio par les deux
artistes qui nous ont livré ce livre.
Milles
mercis pour la terreur,
XxX
Le 7ème
Antiquaire.